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Morsang et le respect de la dignité humaine

Le 27 octobre 1995, le Conseil d’État rendait « l’arrêt Morsang-sur-Orge ». Derrière ce nom, connu de tous les étudiants en droit comme « l’arrêt du lancer de nains », se cache en réalité une décision forte : garantir la dignité humaine. Pour célébrer son 30e anniversaire, la Ville organisera les 17, 18 et 19 octobre 2025 les premiers « Entretiens de Morsang-sur-Orge sur le respect de la dignité humaine » dans les salons du Château.

Dans les années 1990, une discothèque de Morsang-sur-Orge organise des « lancer de nains ». Le principe ? Projeter le plus loin possible un homme de petite taille, équipé d’un harnais et d’un casque, sur un matelas. Bien que consentante et rémunérée, cette activité soulève rapidement des interrogations éthiques et juridiques. Le 25 octobre 1991, Madame le Maire de Morsang-sur-Orge, Geneviève Rodriguez, prend un arrêté pour faire interdire cette pratique.

Mécontents de cette interdiction, les propriétaires de la discothèque et le « cascadeur » portent l’affaire devant le tribunal administratif de Versailles. Commence alors une saga judiciaire. Le tribunal annule l’arrêté municipal au motif que, même si le lancer de nains porte atteinte à la dignité humaine, l’interdiction n’est pas justifiée par des circonstances locales particulières, comme l’exigeait jusqu’alors la jurisprudence.

Face à cette décision, Madame le Maire décide de saisir le Conseil d’État qui opère un revirement. Dans son arrêt du 27 octobre 1995, il affirme que « la dignité de la personne humaine est une composante à part entière de l’ordre public ».

Il permet ainsi une interdiction « même en l’absence de circonstances locales particulières et alors même que des mesures de protection avaient été prises pour assurer la sécurité de la personne en cause et que celle-ci se prêtait librement à cette exhibition, contre rémunération ».

Une jurisprudence fondatrice sur la dignité humaine

Cet arrêt marque un tournant majeur. Il consacre le caractère inaliénable de la dignité humaine, qui ne saurait être marchandée ni négociée, y compris par la personne elle-même. Par cette décision, le Conseil d’État élargit la notion d’ordre public, lui conférant une dimension morale.

La portée de cet arrêt résonne avec les grandes références juridiques françaises et européennes :

  • l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme, selon lequel « nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;
  • la décision du Conseil constitutionnel du 27 juillet 1994, érigeant la dignité humaine au rang de principe à valeur constitutionnelle.

Une semaine de sensibilisation et de débats

L’année 2025 marque donc une date incontournable puisqu’elle célèbre les 30 ans de cet arrêt, historique du droit français. Pour la célébrer, la Ville organisera « Les Entretiens de Morsang-sur-Orge sur le respect de la dignité humaine ». Pendant une semaine, les collégiens et les habitants qui le souhaitent pourront assister à la projection de films comme Elephant Man, La Ligne verte ou encore Rosetta qui seront suivis de débats sur la question de la différence et de la dignité.

Une soirée inaugurale sera organisée le vendredi 17 octobre dans les salons du Château. Tout au long de la soirée, des témoins de l’époque viendront partager ce moment de l’histoire, de leur histoire. Dès le lendemain, des conférences seront proposées le matin sur la portée de l’arrêt ainsi que sur la notion même de dignité humaine. L’après-midi, des « concours d’éloquence » seront organisés et destinés à des élèves avocats, des étudiants en droit, des lycéens et des collégiens. Les finales auront lieu le dimanche 19 octobre avant une remise des prix et une cérémonie de clôture.

Des partenaires de qualité sont déjà confirmés, comme l’école doctorale de Droit de Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, la faculté de droit et de science politique de l’université Évry-Paris Saclay qui assureront l’organisation des conférences et des concours d’éloquence. Car au-delà de la commémoration, cet événement vise à sensibiliser le plus grand nombre sur la question de la dignité humaine et s’inscrira dans le temps avec une nouvelle édition chaque année.